Montée depuis Culoz
Distance : 17,4 km – Dénivelé : 1245 mètres – Pente moyenne : 7,1 % Pente maximale : 14 %
17/20
Ce Ventoux du Jura est apparu tardivement dans l’histoire du Tour de France. Pour situer son niveau de difficulté, il convient de souligner que les meilleurs grimpeurs de l’édition l'ont franchi en tête : Thomas Voeckler en 2012, Rafa Majka en 2016, Waren Barguil en 2017 et Tadej Pogacar en 2020. Sous-estimé en raison de son appartenance à un massif secondaire, le Grand Colombier est le joyau de la chaine. Bien que n'étant pas affilié à l'aristocratie des cols de haute montagne, il propose néanmoins un profil redoutable qui le place parmi les plus difficiles du Tour de France. Son entrée dans le Tour en 2012 a fait de lui le premier col classé HC situé hors des Alpes et des Pyrénées.
Parmi ses quatre routes d’accès, la montée depuis Culoz (256 m) est à la fois la plus rude (17,4 km à 7%) et la plus irrégulière. Cette ascension en paliers dessine trois parties. La première comporte une succession de lacets puis un appréciable replat. La deuxième offre un secteur boisé tandis que la dernière propose un final aéré qui débute après une courte descente.
En quittant Culoz (256m) par ses faubourgs nord, préparez-vous à escalader un véritable mur qui offre de jolis points de vue sur le Rhône, le Lac du Bourget, la Chartreuse, les Bauges et le Mont Blanc. Parvenu au-dessus de la vallée, vous atteignez un ensemble de virages empilés les uns sur les autres après 3,5 kilomètres d'efforts. Progressant en aller-retour, vous délaissez ce divertissement pour affronter une redoutable pente à 10%. A la sortie des Lactes, le défi du jour continue à imposer son dénivelé pendant deux bornes et demi. Le maximum de déclivité est atteint au kilomètre 5 (14%). Vous devez subir une nouvelle borne à 10% sur un tracé tortueux comprenant des portions à 12%.
La dénivellation diminue brusquement à mi-col. Profitez de ce relâchement de pente pour récupérer en prévision de la seconde partie. La portion plate d'une longueur de deux kilomètres prépare un final moins tyrannique que le pied.
Ce deuxième acte d’une dizaine de kilomètres reste exigeant comme en atteste le pourcentage moyen. A 9 kilomètres du sommet, vous laissez sur votre droite la variante menant à Anglefort (879 m) en obliquant sur votre gauche. Les pourcentages grimpent à nouveau à 10% au milieu de la forêt.
Au kilomètre 9,2 débute une interminable ligne droite au bout de laquelle on relève un passage à 10%. A partir du hameau de la Sapette (1218 m) que vous gagnez au kilomètre 12, le paysage se dénude. A quatre bornes du sommet, vous atteignez le deuxième replat de la montée qui permet de remettre du braquet. A 3,2 km de la ligne d'arrivée, vous remontez une jolie prairie en enroulant un lacet sur la droite. Une courte descente de 500 m dessinée à 2 km du panneau du col permet de prendre un peu de vitesse en prévision d'un ultime raidard.
En vous dirigeant vers le sommet, vous chercher du regard l’imposante croix signalant l’arrivée au décours d’une large courbe se refermant sur la gauche.
Ce versant toujours emprunté par les coureurs du Tour propose une ascension télégénique grâce à cette vue plongeante sur le Rhône. Néanmoins le dessin de cette montée condamne les attaques décisives et interdit les gros écarts entre les favoris. La direction du Tour de France acceptera-t-elle de l'abandonner au profit d'un autre versant ?
L’effondrement d’Egan Bernal (13 septembre 2020)
Le Paris Nice 2019 marque l'avènement d'Egan Bernal au plus haut niveau. Dans une édition de la course au soleil qui n'en porte une nouvelle fois que le nom, le colombien fait preuve d'une grande maitrise sur les différents terrains que propose cette épreuve. A peine sorti des couveuses de la Sky, l'héritier de Lucho Herrera révèle une grande maturité en s'imposant à Nice.
Plus jeune vainqueur de la grande boucle depuis 1909 quatre mois plus tard, Bernal est également le premier colombien et latino-américain à remporter l’épreuve. Promis à un long règne comme Jan Ulrich après son succès de 1997, le grimpeur de la Sky est percuté par la comète Pogacar et la galaxie Jumbo.
En acceptant ce que le coureur de la Telekom avait toujours refusé, Bernal s’aligne sur un Giro 2021 peu relevé pour garnir l’armoire à trophées. Vainqueur à Milan, le colombien évite ainsi les embouteillages slovènes de juillet puis participe à la Vuelta en septembre. Malgré un grand numéro lors de l’étape menant aux Lacs de Covadonga, le natif de Bogota termine seulement 6ème de l’épreuve et se voit déposséder du maillot de meilleur jeune.
"Tour de France 2019 et Giro 2021"
La 15ème étape du Tour 2020 qui mène les coureurs au grand Colombier propose pour la première fois une arrivée au sommet. Le début de course voit huit coureurs s’échapper et se disputer les points de la montagne dans la montée de la selle de Fromentelle et du Col de la Biche.
A 13 kilomètres de l'arrivée, Nairo Quintana est dans les cordes. Le cinquième du général cède. A l’arrière du groupe maillot jaune, le tenant du titre Egan Bernal apparait en difficulté. Malgré l’aide de ses équipiers Kwiatkowski et Castroiejo, le colombien s’effondre et perd le Tour. Le nom du coureur d’Ineos vient s'ajouter à la liste des tenants du titre victime d'une énorme défaillance lors de la première explication entre favoris (Greg Lemond dans le Tourmalet en 1991, Miguel Indurain aux Arcs en 1996, Bjarn Riis dans le col d'Azet en 1997). Troisième du général à 59’’ de Primoz Roglic, le dossard 1 termine 25ème de l’étape à 7’20 de Pogacar le vainqueur du jour.
Le colombien qui ne cherche pas d’excuse déclare à l’arrivée "J’ai eu mal à chaque étape mais je ne peux pas m’abriter derrière ce mal de dos. Aujourd’hui, c’était plus un mal de jambes. Je pense que j’ai perdu 3 ans de ma vie dans cette étape. J’ai tout donné, j’ai fait de mon mieux et quand les autres sont plus forts, il faut l’accepter".
"Egan Bernal perd le Tour dans le Grand Colombier"
A l’annonce de cet effondrement, l’impressionnante Jumbo Visma enclenche l’essoreuse en mettant cinq coureurs à la proue du bateau maillot jaune : Robert Gesing, Wout Van Aert, George Bennett, Tom Dumoulin et Sepp Kuss. Ce que ni l’US Postal ni la Sky n’était parvenue à réaliser dans les années 2000 et 2010, l'équipe Néerlandaise y parvient dans la décennie suivante. Wout Van Aert, le spécialiste des classiques Flandriennes et des sprints massifs met sous assistance respiratoire le peloton des favoris sur des pourcentages dignes du Ventoux. L’américain Sepp Kuss qui a pour mission d’accompagner Roglic en montagne entre en action à seulement 600 mètres de la ligne pour lancer le sprint du maillot jaune. Si le drapeau colombien est en berne sur les pentes du grand Colombier, celui de la Slovénie flotte fièrement. L’arrivée se joue au sprint entre le maillot jaune Primoz Roglic et le maillot blanc Tadej Pogacar. Le cadet devance son ainé et s’adjuge sa deuxième victoire sur cette édition après celle de Laruns dans les Pyrénées.
La force collective de l'ancienne Rabobank contraste avec la désintégration d’Ineos. Lors de la manche suivante qui s’achève Villard de Lans, Egan Bernal termine avec le gruppetto à 27’27. Le 127ème de l’étape abandonne le Tour 2020. Souffrant du dos depuis une chute survenue pendant le championnat national, le vainqueur de l’édition 2019 quitte la course un mois après son retrait du Dauphiné. Bernal met un terme à sa saison 2020 qui restera blanche.
L’année 2022 constitue l’annus horribilis pour le leader de l'équipe britannique. Victime d’un grave accident sur ses routes d’entrainement en Colombie, Bernal souffre de plusieurs fractures et d’un traumatisme thoracique. Opéré à la clinique universitaire de la Sabana, le prodige colombien admet être passé proche de la paraplégie.
"Une fin de carrière à la Greg Lemond ?"
De retour à la compétition en 2023, il abandonne une nouvelle fois sur le Tour Juan Jose pour sa course de reprise. Renonçant au Tour d'Andalousie et au Paris Nice, Bernal effectue sa rentrée sur le Tour de Catalogne qu'il décide de quitter après une nouvelle chute lors de la 6ème étape. Aligné sur le premier Tour de Hongrie de l'histoire, le colombien finit 8ème de l'épreuve battu par une pléiade d'inconnus avant de terminer le Tour de France à une déshonorante 36ème place. S'alignant un mois plus tard sur la Vuelta qui fait office de consolante pour les battus de Juillet, le colombien continue sa dégringolade en se classant 55 ème. Le spectre d'une fin de carrière à la Greg Lemond ou Chris Froome à seulement 26 ans commence à hanter ses supporters.
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