54
1
=1
3

Col de la Croix de Fer

  • Altitude : 2064 mètres
  • Département : Savoie (73)
  • Région : Auvergne Rhône Alpes
  • Catégorie : HC

Montée depuis le barrage du Verney :

Distance : 31,6 km – Dénivelé : 1502 mètres – Pente moyenne : 5,4 % - Pente maximale : 12 %

  • Longueur : 5/5
  • Paysage : 5/5
  • Difficulté : 4,5/5
  • Trafic : 3,5/5

18/20

Cette longue ascension qui relie la vallée de la Romanche au sud à celle de la Maurienne au nord est un classique du Tour qui a souvent précédé la montée de l’Alpe d’Huez. Cette redoutable grimpée constitue l’un des obstacles les plus difficiles du Tour de France en raison de sa longueur et de son « irrégularité pyrénéenne ».

Le versant sud-ouest qui débute au hameau de Rochetaillée (711 m) propose à sa sortie deux lacets à 6%. Cet enchainement permet d’accéder au barrage du Verney. Coincée entre le Pic Bayle (3465 m) à l’est et le Grand Pic de Belledonne (2977 m) à l’ouest, une longue approche sur une pente modérée permet d’atteindre le Verney (850 m). Suite au passage devant l’usine électrique apparaissent les premiers reliefs à 9%. Vous laissez sur votre droite la route menant à la station de Vaujany (1250 m) qui a offert deux arrivées d’étape au Dauphine*

croixdefer 1

L’ascension qui suit le cours du torrent de l’Eau d’Olle permet de gagner Rivier-d’Allemont (1254 m). Ce tronçon de 6 kilomètres qui voit son pourcentage moyen augmenter jusqu’à 11% prépare le replat du Rivier d’Allemont au kilomètre 13,5. La route s’enroule en direction de l’est laissant apparaitre la Brèche du Rissiou (2391 m). Une courte descente ponctue ce premier tiers d’ascension. Prenez le temps de savourer ce délicieux enchainement de quatre lacets qui vous mène à la cascade des Sept-Laux (1215 m).

croixdefer 2

A la suite d’une rampe à 12%, deux virages forment l’entrée dans le défilé rocheux de Maupas (1400 m). La route reprend son dessein rectiligne en s’enfonçant dans la Forêt Domaniale de Vaujany. L’arrivée au Lac de Grand Maison propose enfin un relâchement de pente à 7%. Cette pause se poursuit jusqu’au 24ème kilomètre dans un décor sauvage digne de l’Iseran. Le Belvédère que l’on dépasse au 23ème kilomètre permet d’admirer les glaciers du massif des Grandes Rousses au sud. La route épouse alors les contours du Lac sur une pente modérée (5%) qui va même s’infléchir pour la seconde fois. Cet appréciable palier de récupération autorise l’entrée dans le département de la Savoie en empruntant le pont de Rieu-Claret (1740 m) au kilomètre 27. A cet instant de la montée, il ne reste près de 5 kilomètres à parcourir sur une pente désormais régulière (entre 6,5 et 8%).

croixdefer 3

A moins de 3 kilomètres du sommet, un hôtel restaurant dévoile l’embranchement avec la route menant au col du Glandon (1924 m). A 1900 mètres d’altitude, vous êtes proche d’accrocher la mythique Croix de Fer à votre palmarès. En guise de final, la route décrit une courbe ouverte sur la droite sur des pourcentages qui se stabilisent autour de 6%.

Symbole de ce col, l’imposante croix tréflée en métal trône fièrement au sommet. Fidèle à sa réputation, le col de la Croix de Fer offre un défi cycliste en terre sainte dans un décor de haute montagne et une plongée dans le juillet des années 80.

* Victoire de Richard Virenque en 1995 et de Christopher Froome en 2016

croixdefer 4 croixdefer 5

Le raid solitaire de Gert-Jan Theunisse (19 juillet 1989)

Cette étape de 165 kilomètres propose aux coureurs trois monuments le Galibier, la Croix de Fer puis les 21 virages de l’Alpe d’Huez. 6ème du général au départ de Briançon, le maillot à pois Gert-Jan Theunisse s’échappe et franchit en tête le col du Galibier devant Franco Vona et Laurent Biondi. Dans la longue descente qui mène à St Michel de Maurienne, ces trois coureurs sont rejoints par huit contre attaquants et se présentent à St Jean de Maurienne avec 1’15’’ d’avance sur le peloton.

Le hollandais profite de la difficile ascension de la Croix de Fer pour partir seul et réaliser un numéro digne du cyclisme d’avant-guerre. Lors de cette montée en palier, Robert Chapatte fait remarquer à Patrick Chêne qui commente son premier Tour de France que le maillot à pois profite des portions plates et de descente de ce long col pour maintenir son avance. Theunisse qui « a encore de l’huile dans la lampe » selon l’inventeur du fameux théorème lutte contre un vent défavorable mais franchit en tête le col de la Croix de Fer 1’27’’ devant le peloton. Toujours à portée de fusil au cours de cette étape, le coureur de la PDM hésite à se relever dans la vallée de l’Oisans mais poursuit finalement son effort. Theunisse parvient à résister à un peloton sous pavillon espagnol lancé à sa poursuite.

Au Bourg d’Oisans, le hollandais possède 4’14 d’avance sur le groupe des favoris et aborde les 21 virages avec un matelas confortable. Le coureur à la longue chevelure remporte une victoire d’anthologie après un long raid solitaire. Le natif d’Oss aux Pays Bas s’offre son unique bouquet sur le Tour de France et remonte à la 4ème place au classement général qu’il conservera à Paris. Après avoir regardé avec gourmandise le maillot à pois de Rooks l’été précédent, Theunisse s’assure d’être le meilleur grimpeur du Tour 89 suite à sa moisson de points entre le Bourg d’Oisans et l’Alpe d’Huez.

croixdefer Tour de France 1

Dans le groupe des favoris qui comprend Greg Lemond le maillot jaune, Laurent Fignon, Pedro Delgado et son équipier Abelardo Rondon ainsi que Marino Lejarreta, le double vainqueur du Tour démarre à quatre kilomètres de l’arrivée. Cyrille Guimard qui connaît bien Greg Lemond pour l’avoir amené au plus haut niveau remarque que la gestuelle de l’américain traduit une journée sans et intime l’ordre au français d’attaquer. Le californien perd 1’19 sur le parisien qui reprend le maillot jaune pour 26’’.

Cette étape marque l’apogée de la carrière de Gert Jan Theunisse, le coureur ne connaitra plus la lumière sur le Tour de France après 1989*. Le maillot à pois de cette édition appartient à la mystérieuse équipe hollandaise PDM qui comprend également dans ses rangs le dauphin et meilleur grimpeur du Tour 88 Steven Rooks (cf col du Glandon).

A l’instar de la Sky dans les années 2010 avec Bradley Wiggins, Geraint Thomas et Wout Poels, cette équipe transforme de nombreux rouleurs en coureurs capables de rivaliser en montagne avec les grands talents du peloton Fignon, Lemond ou Herrera. Mais la belle histoire sera ternie par les révélations d’anciens pensionnaires de cette école néerlandaise du vélo.

En 2009 dans son livre « Het Laataste Geel » que l’on peut traduire par « le dernier jaune », Steven Rooks avoue s’être dopé à la fin des années 80 à l’hormone de croissance. Son ancien équipier Dag Erik Pedersen assure que son leader prenait également de l’EPO en 1988, ce qui relance le débat sur la date d’apparition de cette hormone dans le peloton que l’on situe autour de 1991.

Cette équipe controversée apparait comme le précurseur d’une nouvelle forme de dopage désormais médicalisée. Les coureurs subissent des prélèvements sanguins plusieurs fois au cours de la saison dans un laboratoire aux Pays Bas dont les valeurs sont corrigées par la prise de pilules. « La préparation » est étoffée pour ceux qui disputent le Tour par ce qui devait être l’EPO selon le norvégien. En effet, l’EPO recombinante serait apparue en octobre 1987 dans le monde du sport dans cadre de la préparation aux J.O d’hiver de 1988 à Calgary (Mais c’est bien connu, le dopage n’existe que dans le vélo et dans aucun autre sport).

« Une équipe controversée »

A la fin des années 80, l’étau se resserre sur l’équipe néerlandaise qui amène Rooks et Theunisse au sommet. Le meilleur grimpeur du Tour 89 est contrôlé positif à trois reprises** et vit aujourd’hui avec un pace maker suite à de nombreux accidents cardiovasculaires que l’on peut imputer à une soupe trop salée pendant les années Mitterrand. L’épisode le plus spectaculaire reste l’abandon collectif de l’équipe PDM lors du Tour 91 en catimini. La communication met en avant un plat de poisson avarié puis une climatisation défectueuse là où la rumeur évoque plutôt une soupe trop salée et mal conservée… Cette défense est immédiatement fragilisée par la présence de l’ensemble de l’équipe (encadrement, soigneurs, managers, cuisiniers, attachés de presse) au sein du même établissement alors que seuls les coureurs ont présenté cet état fébrile. Dix jours plus tard, une contamination des bidons par une salmonelle servira de justification avant que ne cesse la valse des excuses lunaires.

L’équipe médicale de PDM qui avait voulu « ré-équilibrer » Greg Lemond suite à son accident de chasse lors de sa saison blanche de 1988 a par la suite été impliquée dans des affaires de dopage de premier plan (Dr Peter Janssen pour l’équipe Vacansoleil de Ricco et Mosquera et le Dr Erick Rijkaert pour l’équipe Festina). Selon la plume de Pierre Carrey de Libération, cette course à l’armement serait responsable de sept décès de coureurs professionnels néerlandais entre 1987 et 1990. Le journaliste se base sur le témoignage de Dag Erik Pederson. Ces premières expérimentations de l’EPO en seraient la raison sans que cette hormone n’ait pu être directement mise en cause lors des autopsies. Pierre Carrey cite également le Dr Peter Janssen auquel « le programme » avait été confié par PDM. Ce médecin affirme avoir maitrisé la prescription de l’EPO au début des années 90 en modifiant sa posologie tout en recommandant à ses coureurs des séances sur Home Trainer la nuit pour fluidifier le sang. Bienvenue dans les années 90 !

* Le coureur sera absent en 1990, finira 13ème en 1991 et 1992 puis abandonnera en 1994 pour son dernier Tour de France à 31 ans.

** Tour de France 1988, Flèche Wallonne 1990 et Bicyclette Basque 1990

commentaire(s)